11 janvier 2014

Mars One

Êtes-vous partant pour Mars? En ce qui me concerne, je passe mon tour. J’aime l’hiver mais une température moyenne de -67°C dépasse mon seuil de tolérance. C’est sans considérer le facteur éolien (comme on dit sur Terre), dans ce coin de l’Univers, les vents de 100 à 300 km/h sont courants! Pour un Terrien, l’atmosphère y est irrespirable, ce n'est rien pour m’encourager et on ne sait toujours pas comment protéger les cosmonautes du rayonnement cosmique (cancer, peau, yeux, etc.). Vous me direz que je m’attarde aux détails, c’est une manie chez moi. On dit que tout cela sera réglé car il reste dix ans avant le grand départ. Dix ans, c’est si court. Dans dix ans l’échangeur Turcot ne sera même pas complété!
D’autres questions surgissent : possède-t-on un vaisseau pour se rendre là-bas? Pourra-t-on y faire pousser des carottes? Il faudra voyager pendant sept mois avant d’arriver à destination. C’est long, plus long que d’aller à Cuba et une fois sur place, nos voyageurs devront encore vivre cloisonnés… pour le reste de leur vie. Nous parlons ici d’un voyage « one-way ». Les immigrants planétaires auront avantage à bien s’entendre, car il n’y aura personne pour régler les litiges, personne à qui se confier.
Le défi sera grand. Vivre dans les mêmes vêtements pendant plusieurs décennies sera « usant ». Se priver de promenades en forêt, de balades en vélo, de séjours au bord de la mer, de gueuletons entre copains constituera autant d’épreuves. Terminé le magasinage, les visites chez la coiffeuse et les sorties au cinéma. Nos amis devront se passer de leur médecin, leur dentiste et leur optométriste. D’un autre côté, fini les tracasseries administratives avec la municipalité ou le gouvernement, plus besoin d’aller à l’école ou d’obtenir un permis de conduire.
Tout cela coutera-t-il cher? L’organisateur de cette grande aventure est un Néerlandais. Il rêvait d’un projet excluant l’implication d’un gouvernement. Le secteur privé s’occupera de tout. C’est à la mode sur Terre. Les profits seront au rendez-vous, tant qu’il n’y aura pas d’obligations à rencontrer. Si ça dérape, le projet pourra toujours être transféré aux divers États terriens. On le sait, sur Terre les profits sont privatisés et les déficits étatisés.
Toujours selon Bas (le prénom du fondateur du projet), le tout sera financé par une téléréalité et la générosité du public. Notez qu’on vend déjà des t-shirts, des pièces commémoratives et d’autres gadgets du même acabit. Ainsi, des milliards de Terriens suivront les péripéties de 24 colons interplanétaires sur leurs écrans. Ces colons auront été sélectionnés grâce aux votes des téléspectateurs ($)! Le spectacle a besoin d’être bon, car si le public délaisse la série, le financement périclitera et les véhicules ravitailleurs ne partiront plus. Voir mourir les premiers colons constituera le moment fort de la série. Ensuite, puisque les téléspectateurs se nourrissent de nouveautés, il y aura une chute de l’intérêt et dès 2028 ils changeront de chaine.
Tout cela est à mes yeux, une grosse farce, voire une tromperie. Il y a de l’argent à faire, donc le projet vivra sans aboutir ou sera éternellement repoussé. N’empêche que je suis heureux que l’aventure spatiale redevienne populaire (surtout grâce à la Chine qui s’intéresse sérieusement à la chose). Depuis qu’un homme a marché sur la Lune, il me semble que l’intérêt pour l’exploration spatiale avait disparu chez le citoyen ordinaire. Personnellement, je me nourris des découvertes et divers travaux dans ce domaine. Les mêmes commentaires entendus en 1960 sont entendus aujourd’hui soit « … tant qu’il y aura des problèmes sur Terre, pourquoi dépenser de l’argent pour l'exploration spatiale ». C’est le raisonnement qui me déprime le plus. Christophe Colomb et Vespucci se sont butés aux mêmes arguments.
J’ignore pourquoi, mais l’être humain, comme c’est le cas pour les autres espèces, ressent le besoin de se reproduire, de se multiplier, d’étendre son territoire. Voilà pourquoi nous explorerons l’Univers, et plus encore. La curiosité et la recherche de nos origines constituent des motivations. Nous ignorons presque tout en physique, en astronomie comme dans les autres domaines. Nous commençons tout juste à comprendre que le temps n’existe pas sans le facteur « espace ». Plusieurs y voient la clé pour les longs voyages, pour sortir du système solaire. Nous mourrons tous avant de comprendre la chose mais puisque de générations en générations nous réussissons tant bien que mal à transmettre notre savoir, il faut creuser le sujet.
Ainsi, si Mars One peut faire revivre l’idée d’établir une colonie ailleurs que sur Terre, j’y vois un point positif. Cela dirigera notre regard ailleurs que sur nos propres personnes. Peut-être n’est-ce pas une mauvaise idée de prendre des routes hasardeuses pour susciter l’intérêt populaire. Néanmoins, je suis moins certain de cela. En prenant connaissance du projet Mars One, des questions me sont venues à l’esprit :
Quel sera le statut de Mars? Un pays? Une région? Un territoire? Une dépendance?
S’il y a naissance sur Mars, les nouveaux nés seront Martiens. Auront-ils un passeport?
Les Martiens (descendants de Terriens), devront-ils obtenir un visa pour venir sur Terre?
Quelle langue parlera-t-on sur Mars?
La Lune est Américaine (sic). Quel drapeau flottera sur Mars?
Va-t-on y établir un gouvernement? Y aura-t-il un ministère de l’immigration?
Un gouvernement martien établira-t-il ses propres lois?
Mars pourrait-elle se considérer indépendance face à la Terre?
Qui pourrait répondre à mes questions? Mars One se dit non gouvernemental, non politisé.
Dernière question, les Martiens pourront-ils participer aux J.O.?
Grand-Langue